mercredi 10 octobre 2007 par L'intelligent d'Abidjan

Le président de l'association ''Akoudan-Ouflè'', qui signifie en Baoulé ?'Changeons de mentalités'', estime que la démocratisation passe par la sensibilisation des différents groupes ethniques de Côte d'Ivoire. Dénonçant le tribalisme comme arme politique, Kouamé N'Guessan se prononce dans cet entretien sur la situation socio-politique. Quels sont les objectifs que s'assigne ?'Akoudan-Ouflè'' ?
AKOUDAN-OUFLE a été créé pour faire passer les peuples Akans et par ricochet les peuples Baoulé, des habitudes monarchiques à des habitudes démocratiques. Akoudan-Ouflè a une vocation non seulement de démocratisation, mais de création d'une grande communauté Baoulé et à travers cette communauté, créer le développement de nos zones, sur la base de nos cotisations internes. C'est une association certes tribale mais pas tribaliste et surtout anti-tribaliste. Vous êtes, lors de vos conférences, très critique à l'endroit du président Bédié. Que lui reprochez-vous exactement ?
Henri Konan Bedié a été président de la République de Côte-d'Ivoire. Généralement l'on se dit comme il est Baoulé, il a développé les conditions de vie de ce peuple. Ce que nous disons, c'est que le bilan de M. Bédié est nul en Côte d'Ivoire comme en zone Baoulé. Nous n'avons pas ni route, ni infrastructures ni d'électrification. Nous vivons dans la misère totale. Etant donné que le chef est censé apporter un mieux-être à la population, celui qui est déjà passé et qui n'a pu faire grand'chose mais qui veut revenir en s'appuyant sur un prétendu bastion Baoulé abandonné hier, nous disons non. Il n'y a pas à manipuler un groupe dans une démocratie. Il faut que le peuple ait la liberté de choisir celui qui peut lui apporter un mieux-être. Il se trouve que le PDCI joue sur la fibre ethnique pour espérer revenir au pouvoir. Nous disons que nous ne sommes pas dans une monarchie où on choisit sur la base du tribalisme. Mais dans une démocratie, ce sont les valeurs qu'on vote. Qu'est-ce que Bédié peut proposer de nouveau au peuple de Côte d'Ivoire aujourd'hui ? A sa place, j'irai à la retraite ! C'est là que se trouve le débat. Il ne propose rien et il veut qu'on le vote. Et pour qu'on le vote, il manipule l'ethnie. En disant qu'il est Baoulé et qu'il faut que ses frères Baoulés choisissent un des leur car les Bétés n'ont pas droit au trône. KKB est même allé dire aux Baoulé de Tégouakro que'' Gbagbo a envoyé ses frères couper des pieds de cacaoyers des Baoulé et il dort à Yamoussoukro''. C'est une incitation à la haine tribale et à la vengeance, qui n'a pas de place dans une démocratie Houphouët-Boigny avait même fait cette erreur en se faisant appeler ?'Nanan Djaha'', alors que dans la démocratie, on dit ?'Son Excellence'' pour designer le président de la République. Après avoir construit le palais présidentiel suivant le modèle du tabouret royal Baoulé. C'est aberrant. Aujourd'hui, il est question de la Charte des Akans. Il faut éviter d'opposer les ethnies entre elles et nous épargner des génocides dont les plaies sont difficilement cicatrisables. Quand on sait que cette guerre que nous subissons est la résultante de la rédaction de la Charte du Nord, il importe de faire attention aux dérives tribales.
L'actualité politique est dominée par les audiences foraines, votre regard sur ce processus ?
Je trouve que les audiences foraines doivent être confiées au peuple. Nous avons 60 ethnies en Côte d'Ivoire. Il suffit d'aller à la base et on a une identification propre. Qu'on revienne à la méthode Boga Doudou et des Refondateurs qui consistait pour le requerrant à aller dans son village pour se faire recenser. Aucun Ivoirien sérieux ne dira qu'il n'a pas de village. Les groupes ethniques et les familles se connaissent entre eux, il suffit d'interroger ceux-ci. Les sous-préfets et autres magistrats, quel que soit leur niveau d'instruction, ne peuvent connaître les populations d'une localitéSur le plan politique, il n'y a pas encore de paix car l'autorité de l'Etat n'est pas encore établie. Ceux qui doivent assurer la sécurité au Nord sont les rebelles d'hier qui comptent parmi eux des étrangers. Je vois mal un étranger aller défendre un magistrat venu d'ailleurs qui ne veut pas qu'un étranger soit Ivoirien. Donc, tout ce que Guillaume Soro est en train de faire, je dois dire qu'il a de la bonne volonté mais les choses sont précipitées. Tant que l'autorité de l'Etat n'est pas clairement établie, tout le reste, c'est du folklore ! Tant qu'il n'y a pas de désarmement intégral, les tentatives d'audiences foraines avec des fusils connaîtront un échec programmé.
Blaise Compaoré estime que Octobre 2008 est une date raisonnable pour des élections en Côte-d'Ivoire, qu'en pensez-vous ?
Je condamne l'ingérence du Président. Blaise Compaoré. Bien qu'il soit facilitateur dans la crise ivoirienne, il n'a pas le droit de dire la date des élections en Côte-d'Ivoire. C'est une prérogative propre aux Ivoiriens.
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